Lorsque ce fut au point, nos deux heures de répétition journalière étaient écoulées. Ça me laissa le temps de réfléchir, toute seule dans un coin du jardin, à la manière dont j'allais interpréter la réplique suivante. Comme Berthe menaçait de pleurer, Marie acceptait d'aller lui chercher une robe et Berthe précisait vouloir : « la rose avec des petits volants ».
« La rose avec des petits volants » ? Sur quel ton le dire ? Plusieurs options sont possibles, de l'exigence autoritaire à l'humble prière, feignant la tristesse ou la joie. Peut-on dire : « je vais pleurer » et manifester de la joie l'instant d'après ? Oui, c'est possible, j'avais déjà vu des enfants passer instantanément des larmes au rire mais moi, je n'étais pas comme ça. Moi, si je disais : « je vais pleurer » et qu'on m'accordait quelque consolation, mon cœur restait troublé car une consolation, ce n'est pas un cadeau joyeux mais un pansement sur une blessure ouverte. Restait à savoir si Berthe était plutôt comme moi ou plutôt comme les enfants qui passent subitement de la peine à la joie.
Je feuilletai le script dans tous les sens pour essayer d'en savoir plus sur le tempérament de Berthe, sans succès. Quand j'arrivai à la répétition du lendemain, je fis part à ma mère de mes réflexions qui n'avaient abouti à rien, concernant la manière dont je devais dire : « la rose avec des petits volants ».
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